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La décroissance, par Nicholas Georgescu-Roegen

La pensée économique occidentale a complètement ignoré la métamorphose de la science depuis la double révolution intellectuelle de Carnot et Darwin : la découverte de l’entropie et de l’évolution. Dans cet ouvrage de référence, Nicholas Georgescu-Roegen met l’accent sur les axes négligés de la pensée économique et dévoile une vérité écologique importante : le développement ne saurait se poursuivre sans une restructuration et une réorientation radicale de l’économie. Économiste et mathématicien de renom, Nicholas Georgescu-Roegen a été à l’origine du mouvement de la décroissance, dont cet ouvrage phare est sans conteste le manifeste. À l’heure où l’urgence climatique se fait de plus en plus pressante, il est nécessaire de relire ce livre aux accents prophétiques.

Réarmement démographique – Faites des enfants !

Réarmement démographique – Faites des enfants !

Lors de sa conférence de presse de rentrée1, le président Macron a parlé de beaucoup de sujets, mais un sujet particulier nous a fait réagir : la mise en place d’un congé de naissance, en lieu et place du congé parental actuellement existant.

Pourquoi ?

Notre natalité baisse. Nous faisons moins d’enfants. Comme le dira le député Sylvain Maillard lors d’une intervention à la radio quelques jours plus tard, en faisant le service après vente du président : « Si on accepte une société où il n’y a que des personnes âgées, c’est la mort d’une société, il faut un équilibre entre les naissances et les décès. » Pour sauver la société, il faudrait mettre en place des mesures importantes pour augmenter le taux de natalité et considérer les personnes âgées (personnes de plus de 60 ans selon l’OMS) comme inutiles à cette société.

Mais la natalité n’était-elle pas un de nos points forts ?

Oui, nous avons un des taux de natalité les plus élevés en Europe. À peine devancés par l’Irlande en 2011, nous sommes d’ailleurs les meilleurs en 2021 avec 1,84 enfants par femme. Entre 2011 et 2021, on constate une augmentation du taux de fécondité (Tchéquie par exemple, ou dans une moindre mesure l’Allemagne) et une baisse pour d’autres pays. Le taux pour l’Union Européenne reste stable.

Pour la France, on remarque d’ailleurs que le nombre de naissances (autour de 700 000 bébés en 2023) est assez faible, mais ne marque pas un décrochage massif.

Pour contrer cette baisse qui semble un dossier important pour le président, le député propose notamment « la mise en place d’un nouveau congé de naissance […] qui viendra remplacer le congé parental actuel. »

Comment cela fonctionne en France ?

Comme on se plaît à le faire, l’approche des congés est particulièrement complexe. C’est un petit régal pour les gens qui adorent la multiplication des strates administratives.

Strate 1 : Le congé de naissance : 3 jours, attribué au père et à la mère, rémunération prise en charge à 100 %. C’est dans le Code du Travail, il est obligatoire.

Strate 2 : Le congé maternité2 : attribué à la mère 6 semaines avant la date d’accouchement prévu, 10 semaines après l’accouchement (soit 16 semaines au total, 10 de plus à partir du 3e enfant).

Strate 3 : Le congé paternité3 : 25 jours calendaires (32 jours si jumeaux), dont 4 jours sont obligatoires, les autres jours sont à prendre en une fois ou fractionnés en deux fois, dans les 6 mois suivant la naissance, pour le conjoint donc, non obligatoire mais impossible pour l’employeur de les refuser.

Vous pensiez que c’était fini ? Non, le dernier dispositif, c’est celui que vise le président :

Strate 4 : Le congé parental d’éducation45.

On va ergoter, mais le congé parental d’éducation n’est pas rémunéré. Il est de droit (l’entreprise où vous travaillez ne peut pas le refuser) et dure un an, que l’on peut prolonger deux fois. Soit un total de trois ans, ou presque… puisqu’il ne peut pas dépasser la date du troisième anniversaire de l’enfant. Oui, on aime les choses compliquées, on vous l’a dit.

MAIS

Si vous n’avez pas de rémunération, vous avez le droit à la PreParE (« prestation partagée d’éducation de l’enfant »). Si elle dépend de plein d’éléments, elle est en général d’un montant de 428,71 €. Vous avez le droit de cumuler 2 PreparE au sein d’un couple, mais le montant cumulé ne peut pas dépasser… 428,71 €, vous l’avez deviné.

Pour le 1er enfant, chaque parent peut bénéficier de l’aide pendant 6 mois (possible ensemble ou l’un après l’autre), 24 mois pour le deuxième, 48 mois à partir du troisième. C’est le cas général, mais il existe des cas particuliers en cas de parent seul ou d’adoption.

OK… t’as fini, là ?

Eh non : il existe aussi la PreParE majorée. Si on a trois enfants, on peut percevoir une aide majorée (700,74 €), mais qui sera versée pendant 8 mois ; dans la limite du 1er anniversaire de l’enfant (sauf dans le cas de triplés… si, si).

Que propose le président de la République ?

On n’a naturellement pas le projet de loi sous les yeux, mais on peut assez facilement traduire son approche :

« il sera mieux rémunéré et permettra aux deux parents d’être auprès de leur enfant pendant six mois s’ils le souhaitent. »

Dans l’idéal, on pourrait imaginer un congé de 6 mois, à prendre quand on le souhaite (en même temps ou non) avec un quasi-maintien de salaire, et cela après la période de 10 semaines pour la personne qui a accouché. Le système serait plus simple, même si l’auteur de ces lignes se doute que cela sera plus complexe en réalité.

Les femmes sont moins payées que les hommes et il se dit que c’est en raison des interruptions de carrière dues aux grossesses et à la naissance des enfants. En ouvrant droit à un congé de naissance équitable, l’égalité homme/femme serait en théorie possible, tant pour les grilles de salaire, que sur les évolutions de carrière.

Pour conclure et en écoutant ce que dit le député Maillard : « On a changé de situation économique, le quoi qu’il en coûte est derrière nous, l’argent public est rare, nous devons revenir au 3 % de déficit. »

L’idée n’est donc pas que le système coûte plus cher que l’actuel.

Le congé de naissance : bonne proposition… ou pas ?

La proposition tape sans doute à côté, et pas qu’une fois.

La maternité

On commence par le suivi médical d’une grossesse et l’accouchement. C’est une première piste à aborder quand on veut inciter les gens à devenir parents et à le devenir sereinement.

Selon les derniers chiffres des autorités sanitaires (DREES, 20226), le nombre des maternités est passé de 816 en 1995 à 478 maternités en 2020, soit une baisse de 42 %. Dans les maternités, le nombre total de lits a été divisé par deux depuis 1975 : il est passé de 32 000 à 14 000 fin 2020. Le taux d’utilisation des lits des maternités a fortement augmenté durant cette période. Il est passé de 23 à 49 accouchements annuels par lit, en moyenne, entre 1975 et 2020.

Cela implique que, dans certains déserts médicaux, des femmes se trouvent à plus de 45 minutes d’une maternité. Comme l’indique le sénateur Joly dans une proposition de loi, « un temps de trajet supérieur à 45 minutes double le taux brut de mortalité du nourrisson et celui de la mortalité périnatale. ». Ce chiffre provient d’une étude publiée dans le Journal de gestion et d’économie médicales en 2013.

En 2022, à l’initiative d’une enquête menée par l’association Santé en danger, 49 maternités ont indiqué être en fermeture partielle : arrêt ou réduction du suivi de grossesse, arrêt des cours de préparation à la naissance, par exemple. La pénurie des soignants qui touche l’ensemble de l’hôpital touche aussi les maternités.

Les modes de garde

La proposition du congé de naissance a un intérêt certain : mettre en avant les limites des modes de garde en France.

En effet, si certaines personnes prennent ce congé parental d’éducation, c’est surtout pour éviter de dépenser énormément d’argent dans les modes de garde… quand ils existent.

Le premier conseil donné aux futurs parents est de réserver une place plusieurs mois avant la naissance de leur enfant. Même dans ce cas, l’offre potentielle est en France de 59,8 places pour 100 enfants âgés de moins de 3 ans (source CAF7).

Imaginez la tension que risque d’apporter cette proposition sur un marché déjà sous doté !

Le député Maillard écarte cette problématique assez rapidement : « Il faut un large éventail de possibilités ».

Il y a déjà un problème de mode de garde : la première solution serait peut-être de le régler avant de proposer une mesure qui risque de l’amplifier !

Bon, mais au moins sur les salaires ?

En 2021, l’observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)8 a réalisé une étude étudiant la première réforme du congé parental d’éducation (la PreParE) qui a été proposée en 2015.

L’OFCE la résume ainsi :

« La loi modifie la durée et la répartition du droit à l’allocation entre les parents : pour un premier enfant, la durée maximale de versement a été étendue, passant de 6 mois à partager entre les deux parents avant la réforme à 6 mois pour chaque parent après la réforme ; à partir du deuxième enfant, la réforme réduit à deux ans maximum la période d’indemnisation pour un même parent au lieu de trois initialement, ce qui oblige l’autre parent à prendre une partie du congé pour couvrir la période jusqu’aux trois ans de l’enfant. »

Le premier objectif affiché par l’État était de passer de 0,5 % de congé parental d’éducation pris par les hommes à 25 %. Le résultat 6 ans après la réforme est sans appel et se passe de commentaire, la prise de congé parental d’éducation par les hommes est passée de 0,5 % à 0,8 %.

Le deuxième objectif affiché par l’État était d’encourager les femmes à retourner sur le marché du travail plus tôt pour limiter la perte d’expérience et de carrière. On remarque en effet que, quand on ne perd que deux ans de progression de salaire lié à la carrière au lieu de trois, le revenu des femmes augmente. Cependant, les résultats suggèrent aussi un fort recours au chômage, ce qui indique la difficulté de retrouver un travail s’il a été perdu pendant le congé parental d’éducation. Il est aussi à noter que cette réforme affecte négativement les revenus des mères qui étaient à faible revenu ou loin du monde du travail, alors qu’il affecte positivement les revenus des mères à revenu moyen ou haut.

En conclusion

On peut supposer que cette réforme, qui va dans le même sens que la réforme de 2015, aura donc les mêmes effets, à savoir que :

le recours au congé parental d’éducation ne sera pas plus pris par les hommes qu’avant, ou à la marge ;

les femmes qui le peuvent le prendront ;

les femmes les plus pauvres seront désavantagées par le dispositif ;

l’effet sur les discriminations hommes/femmes dans le travail sera à peu près nul.

Les études que nous avons lues ne proposent que peu de solutions. Lutter contre une vision genrée du congé parental est bien proposé par l’OFCE qui explique que «Quoi qu’il en soit, cela suggère qu’une meilleure indemnisation du congé parental ne suffirait probablement pas pour accroître le recours des pères.».

Comme souvent en politique, le problème est global et doit être abordé par une approche multifactorielle. Si on veut augmenter le nombre d’enfants en France, il faut que l’ensemble de l’environnement s’y prête. Il faut pour cela avoir un système de santé qui fonctionne bien (voir programme du Parti Pirate : mesures d’urgence pour la santé et les hôpitaux) et permettant le libre choix des parents.

Il faut aussi, et cela transparait dans l’ensemble des textes lus, lutter contre une société trop patriarcale, où l’homme ne s’occupe pas des enfants car c’est à la femme de le faire.

Il faut également être très prudent dans les mesures prises.

Les Pirates sont attachés à la liberté, et tout particulièrement à la liberté des femmes d’avoir des enfants — il faut pour cela mettre tout en œuvre pour que cela soit possible sans danger — ou de ne pas en avoir, et tout cela sans discrimination.

1 : Conférence de presse d’Emmanuel Macron Retour au texte2 : Lien Service public Retour au texte3 : Lien Service public Retour au texte4 : Lien ministère du Travail sur le congé parental d’éducation Retour au texte5 : Lien CAF PREPAR Retour au texte6 : Liens Rapport DREES 2022 Retour au texte7 : DNAF RAPPORT Accueil jeune enfant 2020 Retour au texte8 : Policy brief 88 – 6 avril 2021 Retour au texte

L’IA, c’est comme un chat : ça fait ce qu’elle veut

À moins que vous ne viviez au fond d’une grotte, vous n’avez pas pu passer à côté des dernières applications d’Intelligences Artificielles, d’abord en bruit de fond avec Dall-E, puis en novembre avec l’arrivée fracassante de Midjourney et, maintenant, ChatGPT, cette IA qui est capable de tenir des conversations, en tout bien tout honneur. Étonnements, peurs, questionnements, opinions, il est temps de faire un petit tour d’horizon.

C’est quoi, une IA ?

Intelligence Artificielle, IA, AI, deep learning, apprentissage par renforcement, réseaux de neurones, algorithmes génétiques pour les termes barbares, Midjourney, Dall-e, Stable Diffusion, ChatGPT (prononcez « djipiti »), Watson, AlphaGo pour les stars entraînées par les plus grandes firmes, la multiplication des termes fait tourner la tête. Mais il ne faut pas avoir peur du premier mot énoncé dans ce paragraphe : intelligence. Ici, et pour l’instant encore, il n’est pas question de l’intelligence au sens où nous le concevons tous les jours et qui fait la part belle aux romans de science-fiction, cette forme de conscience qui pourrait se révéler dangereuse dans ses désirs et ses besoins que l’on appelle « Intelligence Artificielle Forte », le Saint Graal de la recherche sur les IA. Mais, heureusement pour l’humanité, nous n’en sommes pas encore là.

Dans le cas qui nous intéresse, le terme intelligence c’est le « traitement-de-l’information-plutôt-futé-qui-n’a-pas-été-proprement-créée-par-un-être-humain ». Cette Intelligence Artificielle, dite Faible, est un algorithme comme un autre mais, comme votre cerveau, il s’agit d’un algorithme un peu plus spongieux et mou que ceux que l’on a l’habitude de voir ou de créer dans l’industrie du développement d’application.

Spongieux et mou, cerveau, réseaux de neurones ? Humour ? Non. Les chercheurs et chercheuses et leurs collègues de l’ingénierie aiment beaucoup s’approprier des mécanismes de la Nature, cet être anthropomorphique qui joue depuis toujours avec le hasard. En outre, les « problèmes » que l’on propose de résoudre avec ces IA ne sont pas vraiment compatibles avec la vision binaire habituelle des ordinateurs pour qui, en dehors des 0 et des 1, point de salut.

« Ça ressemble plus à un chat qu’à un chien »
« Habituellement ce coup aux échecs a plus de chance d’apporter la victoire que ce coup là »
« On dirait bien qu’il y a quelque chose d’anormal dans cette image ».

Réagir en fonction de probabilités, c’est ce côté un peu mou qui est recherché afin de permettre de réagir au plus grand nombre des possibles tout en essayant au maximum de réduire la complexité du problème à résoudre.

Par ailleurs, une intelligence artificielle ne sort pas ex nihilo de l’esprit d’une équipe de développement, il y a d’abord une phase d’absorption d’informations, de sélection, d’apprentissage où les « prémices » d’une IA sont confrontés à des mécanismes impitoyables de reproduction, de génétique, d’analyse, un peu comme pour les neurosciences et la sélection naturelle. Il n’est toutefois pas question encore une fois ici de biomimétisme, c’est tout simplement une façon naturelle de travailler. De fait, l’apprentissage, le renforcement, sont des mécanismes que nous connaissons à notre niveau, nous transformant, nous aussi, en éponge.

Issus de ces apprentissages et d’une sélection impitoyable, nos IA sont donc maintenant capables de nous battre aux échecs ou au jeu de go, de faire de jolies images et des textes syntaxiquement corrects, voire, avec quelques artifices, de tenir des conversations ou encore, et c’est pour le mieux, de détecter des tumeurs sur des radios. Alors on est aujourd’hui en droit de s’interroger, faut-il continuer à faire des études de médecine pour sauver les gens d’un cancer ? Ou encore, y-a-t-il un espoir de percer dans le monde artistique si l’on peut demander à une IA de faire un dessin sur demande ?

« Le Terminator de nos métiers »

Rassurez-vous, le spectre d’un Skynet, conscient, qui se retourne contre l’humanité, reste encore, pour l’heure, du domaine de la science-fiction, le reste ne serait qu’erreur humaine. Non, les IA qui émergent aujourd’hui ne sont pas conscientes et elles ne font des choses que parce que les humains les y autorisent. Mais tout cela n’empêche pas d’autres peurs d’émerger du tréfonds de nos cerveaux prompts à voir tous les dangers dans les nouveautés qui arrivent, à tort ou à raison.

Aujourd’hui, les domaines d’activités qui se sentent, à juste titre, en danger, sont les domaines du graphisme, de la communication et… du développement. Et cette peur n’est pas sans fondement, on a appris, en décembre dernier, qu’une maison d’édition avait choisi d’utiliser une création d’IA en couverture d’un roman1. L’argument avancé de la concurrence déloyale est fondé.

Malgré tout, il reste une incompréhension ici entre l’homme et la machine. Que ce soit du code, une peinture ou un texte généré par une IA, cela n’enlève pas le jugement de qualité par un être humain. Oui, la photographie a mis au chômage les portraitistes, cela a-t-il mis fin à toute forme de peinture ? Il est sain d’avoir peur pour son gagne-pain quand il est de plus en plus difficile d’avoir une situation stable, et se voir confronté à la concurrence d’une IA qui pond des images à la demande, en quelques secondes, tel un stakhanoviste sous stéroïde, est quelque peu décourageant.

D’un autre côté, de nouveaux « métiers » de prompteurs, autrement joliment dit des personnes qui murmurent à l’oreille des IA, apparaissent, leur talent réside en la compréhension du fonctionnement de ces IA afin de les guider vers le résultat souhaité. Cela n’invalide absolument pas la peur légitime des personnes qui se sentent dépossédées de leur art, et si déjà les illustrateurs et les scénaristes sont au courant, il y a fort à parier que l’ensemble de l’industrie du divertissement, en passant par les acteurs, les compositrices et autres accessoiristes voient à leur tour leur avenir s’assombrir tant les capacités de calcul vont permettre, dans un court avenir, de composer plus facilement de la musique ou de remplacer des acteurs voire de créer des scènes entières sans leurs concours. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres puisque le champ d’activité des IA s’étend de jour en jour, allant de la recherche sur les protéines jusqu’à l’innovation architecturale…

Mais au fond le problème vient-il de l’IA ou de notre accès à une vie décente ?

Efficacité et Usages

Il semble plus facile d’accepter d’une IA qu’elle nous batte aux échecs ou au jeu de go2 car l’humain sent bien que la combinatoire de ces jeux est en faveur de la machine, et quand bien même une IA serait plus forte que les humains à ceux-ci, cela ne les empêche pas de s’affronter afin de chercher le potentiel de l’être humain qui, malgré tout, aura pu créer un outil qui lui est supérieur sur bien des aspects. En revanche, l’arrivée de ChatGPT, et de ses co-intelligences, nous interpelle un petit peu plus car nous avons l’impression qu’elle touche un petit peu plus à ce qui nous caractérise en tant qu’être conscient : la subtilité, la compréhension, l’échange, la créativité. Mais il faut comprendre leur fonctionnement pour se rassurer un peu et se dire que, sur ces domaines, ces dernières feront de bons assistants mais, pour l’instant, elles ne sont pas capables de nous évincer. Ce qui fait la force des IA qui nous vainquent sur les jeux stratégiques, ce n’est pas tant la force de calcul que la brutalité de l’expérience acquise : l’IA peut jouer contre elle-même rapidement, très rapidement. L’IA qui a vaincu Lee Sedol avait « seulement » joué une trentaine de millions de partie, ce qui en temps humain équivaut à plus de 3500 années de jeu non-stop3. En revanche, la tâche de nos compères créatifs est bien plus subtile à mesurer, puisque ce sont nos sentiments, notre intelligence qui sont mesurés et non la qualité et la diversité d’un jeu. Et à ce jeu, ce qui les rend digne d’être des assistants et non des maîtres, c’est que ces IA ont plus appris à nous « manipuler » qu’à nous répondre. En effet, l’être humain mesure l’efficacité de l’IA avec ses biais, son sens du beau, son sens du vrai, cependant une IA vous répondra ce qu’elle vous répondra non pas pour l’amour de la vérité, mais pour réussir à avoir un pouce bleu un bon score d’acceptabilité, ce qui n’est pas forcément la bonne méthode pour éclairer les faits de vérité mais reste assez intelligent pour survivre une semaine de plus… Le rapprochement avec le corps politique et sa vision court-termiste électoraliste est tout proche : plaire à la personne qui demande et non lui répondre correctement, tel est son credo.

Ethique et morale

Que ce type d’intelligences artificielles faites pour s’approcher du comportement humain aboutisse à un comportement de tromperie est un problème en soi. En effet, le monde n’est pas constitué que de gens vertueux qui n’essaient que de faire le bien autour d’eux. Le fait que ChatGPT soit capable de générer des textes ayant un trait de véracité rien que pour ceux qui l’interroge permet, de fait, de créer des contenus vraisemblables, et à une vitesse folle, parfaitement adaptés pour les « spécialistes » de l’hameçonnage, de l’usurpation de l’identité et autres spammeurs.

L’utilisation à bon escient est l’un des problèmes que la science essaie de résoudre par le biais des mécaniques de renforcement humain et d’une « scolarisation » des IA pour les rendre moralement justes, mais ce n’est pas ce qui est le plus facile, et cela l’est d’autant moins que cette même recherche a, elle aussi, des problèmes quant à sa propre éthique. Les problèmes principaux rencontrés aujourd’hui tournent autour des sources de données, de leur labellisation et des personnes qui s’occupent d' »éduquer » ces jeunes pousses numériques.

Pour éduquer les IA, pour les nourrir, la somme des données utilisées est gigantesque. Pour l’entrainement d’IA génératrices d’images, on utilise allègrement des bases d’images, de photos, de dessins, de peintures, soit des milliards d’objets4. Ces banques d’images ratissent large, elles aspirent des sites puis labellisent le contenu et ne s’occupent qu’après, si elles s’en occupent, de la gestion des droits d’auteurs. Et quelque soit votre (et notre) opinion sur le sujet, c’est important, ne serait-ce que d’un point de vue légal.

Sur ces banques d’images, des messages d’alerte fleurissent pour indiquer que ce « problème » est en cours de résolution, et qu’il serait sage de ne pas laisser ces applications d’ IA ouvertes et accessibles tant que ce n’est pas résolu, mais il semblerait que pour certaines autres banques d’images, ce côté légal ou éthique soit mis de côté au nom du progrès. Droits d’auteur, RGPD et autres législations seraient alors considérés comme des adversaires du progrès. Par ailleurs, que devrions-nous penser si une banque d’images copyleft (réutilisation et évolution possible en gardant la même licence) était utilisée dans le cadre de l’entrainement d’une IA potentiellement payante ? D’un autre coté, est-ce qu’un peintre s’étant éduqué en étudiant des œuvres exclusivement disponibles dans des musées payants ou des manuels hors de prix ne serait pas dans une situation similaire ?

Quant à l’utilisation à bon escient de la technologie, ce problème peut se résumer à la maxime Quis custodiet ipsos custodes ?5 (Qui me gardera de mes gardiens ?) Ces IA, on l’a vu, sont éduquées « moralement » pour éviter tout débordement qu’ont connu leurs aînées par le contact non contrôlé avec un public de trolls. Ces gardiens imposent donc une vision fatalement biaisée de leur morale à des IA qui feront en sorte de la respecter. Et ce biais permet possiblement de perpétuer des mécanismes de pensées, en plus de déjà perpétuer, voire d’amplifier, d’autres biais liés aux genre, sexe, religion, couleur de peau, issus des données. Ces mêmes données peuvent en outre être noyées à dessein par de l’information de piètre qualité pour contrebalancer des faits importants, justement quand on touche à cette notion précieuse de vérité. C’est ce qui rend le travail encore plus difficile pour ces éducateurs dont le métier apporte de nouvelles souffrances, tant une IA amorale peut générer comme horreurs6.

Bien entendu, l’entrainement de ces « êtres » numériques demande du matériel et de l’énergie. Heureusement, la gestion de la consommation de ressources est rentrée dans nos mœurs et est aujourd’hui bien plus mesurée7 et raisonnée, l’entrainement des algorithmes, qui est plus coûteux que l’utilisation unitaire, doit s’effectuer dans un centre de calcul alimenté par une électricité décarbonée.

Le dernier point, et peut-être le plus important quant à la naissance de certaines IA, réside dans la pertinence de leurs usages. Passer de la génération d’image, de texte, voire de vidéos, à la prise de décisions, qui pour aider la police, qui pour aider la justice, qui pour aider l’armée, est très tentant… Et c’est sur les limites à ne pas dépasser que la science-fiction nous met en garde. « Si les machines ne doivent pas être tenues responsables, alors elles ne doivent pas prendre de décision de gestion8« . C’est pourquoi la recherche doit faire attention aux projets qu’elle lance en incluant des comités d’éthique sur le sujet, et les industriels doivent en faire autant, afin de ne pas s’aventurer sur un chemin où un être humain ne serait plus « nécessaire » pour faire du mal à l’un de ses semblables ou à une communauté, où l’IA serait « trop » libre.

S’en sortir

« On va nous remplacer et en plus les méthodes pour le faire ne sont pas des plus vertueuses ».

Est-ce la fin de l’histoire ? Doit-on tirer un trait sur des assistants qui peuvent faciliter notre travail ? Doit-on surréagir et les bannir de notre sphère d’action ? Le fait est que ces IA existent, elles ne disparaîtront pas comme ça. Alors il serait sage d’introduire l’éthique et la morale qui pouvaient manquer jusque là.

La recette est simple : l’ouverture et la transparence.

Tant dans la recherche que dans la mise à disposition, il faudra impérativement faire preuve de précision et de justesse autant dans les sources d’apprentissage que sur les méthodes et la mécanique de labellisation et de renforcement, quitte à demander de l’aide aux différentes communautés qui souhaiteraient bénéficier des avantages de ces futurs assistants. Il faudra bien entendu permettre la réplication et l’utilisation autonome des modèles déjà entraînés ou des projets en cours de développement. En ce sens, l’équipe derrière « Stable Diffusion » a publié le code source9 et le modèle de son IA proposant de la création d’image numérique.

Les IA ne sont que des algorithmes un peu plus sophistiqués que la moyenne, et même s’il n’est pas nécessaire de savoir coder pour les comprendre, il est important de savoir que ça existe.

Nous vous invitons donc, avant d’émettre un avis tranché à leur sujet, à vous approcher de ces technologies pour « jouer » avec afin de pouvoir comprendre par vous-même leurs usages ET leurs limitations mais aussi pour pouvoir vous prémunir de manipulations. Un « c’est vrai parce que je l’ai lu/vu sur internet » ne doit pas se transformer en « c’est vrai, c’est ChatGPT qui me l’a dit ».

Oui, une personnalité politique vous promettrait parfois la lune pour avoir votre soutien, une IA aussi.

D’ailleurs, l’IA ChatGPT le dit elle-même mieux que personne :

farlistener :

Bonjour, as-tu des biais cognitifs ?

ChatGPT :

En tant que modèle de langage développé par OpenAI, je n’ai pas de sentiments, d’émotions ou de perceptions, donc je ne suis pas soumis à des biais cognitifs dans le sens traditionnel. Cependant, il est important de noter que tous les modèles de langage formés sur des données dépendent en partie des biais présents dans ces données, donc il est possible que mes réponses reflètent des biais implicitement appris à partir des données d’entraînement. C’est pourquoi il est important de toujours examiner les réponses des modèles de langage avec un esprit critique et de les vérifier avec des sources fiables.

1 : Une couverture de roman générée par une IA suscite le mécontentement Retour au texte2 : et encore, quand on voit que le meilleur joueur de go au monde a préféré quitter le navire Retour au texte3 : si on compte une durée moyenne d’une heure par partie Retour au texte4 : ici une base de 5 MILLIARDS d’images Retour au texte5 : Parce que de temps en temps une locution latine ça fait classe Retour au texte6 : ChatGPT : derrière la magie, l’horreur pour des travailleurs kenyans payés une misère pour l’expurger des contenus violents Retour au texte7 : Consommation énergétique de l’utilisation de l’IA Retour au texte8 : https://twitter.com/bumblebike/status/832394003492564993 Retour au texte9 : le code source de Stable Diffusion est public Retour au texte

Piratage mondial en cours…

Avis au Pirates et camarades des Pirates de France,

Dans les mois et années qui viennent, nous allons avoir plus que jamais besoin de votre aide et de votre participation au sein de notre organisation politique.

Samedi 28 janvier dernier, le Parti Pirate International choisi une de nos porte-paroles, Florie MARIE, comme Présidente.

Nous, Pirates, n’y étions pas du tout préparés, cela s’est joué à la dernière minute et sur le fil, c’est complètement inattendu et croyez bien que c’est une énorme surprise.
Surprise parce que 48h avant cette élection il n’était pas du tout question qu’elle y présente sa candidature.
Surprise parce que depuis plusieurs années, nous, les Pirates français, avions pris nos distances avec l’organisation Pirate internationale que nous considérons, malgré les personnes exceptionnelles qui l’animent depuis des années, comme verrouillée et moribonde.
Surprise parce que c’est avec le soutien notamment du Parti Pirate Allemand, qui est aujourd’hui encore le plus gros Parti Pirate du monde en nombre d’adhérents, que nous avons fait une entrée fracassante et par la plus grande porte dans le bureau du Parti Pirate International dans lequel nous n’avions plus mis les pieds depuis plusieurs mois, voire années.
Surprise aussi parce que cette entrée ne s’est pas faite si simplement que cela, en face de nous il y avait des représentants de la vieille garde du Parti Pirate, ceux que nous considérons comme les fossoyeurs de notre organisation.

En prenant la présidence du Parti Pirate International, nous nous sommes offert une opportunité sans précédent de faire rayonner, à travers le monde, le modèle organisationnel que nous avons choisi d’adopter en France il y a 5 ans maintenant. Un modèle horizontal, non hiérarchique, démocratique, équitable et réactif en démocratie délégative1.

Mais la tâche qui nous attend sera longue et fastidieuse. Nous allons devoir plus que jamais nous rassembler et travailler ensemble sur les projets que nous sommes en train de mener et sur ceux à venir, que ce soit en France ou au niveau mondial.

En France d’abord, nous devons mener à leur termes les différents projets entamés, certains sont plus avancés que d’autres :

La Boutique qui devrait bientôt ouvrir ;
Le Week-End du Parti Pirate (#WEPP) qui aura lieu du 14 au 17 avril à Strasbourg ;
La mise à jour du Programme2 qui est un gros travail permanent qui nécessite toute l’aide possible des Pirates et de leurs soutiens afin de le rendre cohérent et aussi complet que possible ;
Les retours d’expérience des membres sur l’organisation interne34 : ces retours sont précieux car ils nous permettront de poser des arguments solides lors de la présentation de notre modèle organisationnel au niveau international à travers notamment la rédaction d’un livre.

Sur la scène internationale ensuite, nous allons entamer différents chantiers qui seront assurément beaucoup plus longs. Nous avons, à court terme, tout un travail de communication interne et externe à reprendre pour permettre à toutes les organisations de dialoguer entre elle et de faire circuler les informations. Il s’agira notamment dans un premier temps de déployer des outils d’échange et de partage accessibles et rapides à mettre en œuvre. Nous avons également besoin, à moyen terme, de consolider un socle de valeurs communes afin de donner aux membres des Partis Pirates autour de la planète des références de base sur les idées portées et défendues par nos organisations. En France, nous avons notre Code des Pirates, il est temps que ce code rayonne lui aussi. Enfin, sur un plus long terme, nous entamerons une grande réforme statutaire qui devra nous mener vers l’organisation équitable et transparente que nous aspirons voir émerger. Il va de soi que pour réussir à mener ces projets, nous aurons besoin des talents de traduction de toutes les personnes volontaires.

C’est pour mener à bien ces projets, et d’autres encore, que le Parti Pirate français a besoin de vous aujourd’hui. Nous avons du pain sur la planche et besoin de toutes les forces vives, et pour accueillir au mieux ces forces vives, nous avons aujourd’hui déployé différents outils :

Les formations Mousse et Flibustiers qui sont dispensées très régulièrement, sur demande auprès de l’équipage formation et du Conseil de Vie Interne ;
Le git du Parti Pirate qui nous permet de travailler efficacement et en collaboration sur les contenus du site du Parti Pirate ;
Les équipages thématiques, projets et géographiques qui permettent à chaque Pirate de s’investir selon ses aspirations ;
Des réunions de travail très régulières et ouvertes à la totalité des membres du Parti Pirate, notamment sur la communication de notre organisation tous les lundis soirs à 21h.
Les lettres d’informations internes et externes qui nous permettent de communiquer aux membres du Parti Pirate les projets et événements en cours et à venir.

Notre organisation n’est pas parfaite, mais le chemin parcouru depuis l’adoption de nos statuts actuels en 2018 nous a permis d’apprendre de nos erreurs et de nous organiser au mieux pour que chaque membre puisse s’intégrer pleinement dans l’organisation, à son niveau et selon ses disponibilités.
Il est temps maintenant de rassembler toutes les personnes volontaires et disposées à aider notre organisation à mener ces chantiers à leur terme. Autrement dit, si vous attendiez le bon moment pour adhérer et vous engager à participer aux projets du Parti Pirate, ce moment c’est maintenant !

1 : https://partipirate.org/organigramme Retour au texte2 : Lien vers le programme du Parti Pirate Retour au texte3 : https://discourse.partipirate.org/t/appel-a-temoignage-votre-experience-du-parti-pirate/32440/ Retour au texte4 : Lien vers le sujet du forum : Appel à témoignage – Votre expérience du Parti Pirate Retour au texte

Chat Control

Cet article est une traduction de l’article de Patrick Breyer1.

En mai 2022, la Commission européenne a proposé un règlement visant à obliger les fournisseurs de services en ligne à fouiller automatiquement tous les chats, messages, e-mails et stockages en ligne privés à la recherche de contenus suspects – de manière générale et sans distinction. L’objectif déclaré est de poursuivre le partage de matériel pédopornographique ou de sollicitation d’enfants à des fins sexuelles. Les fournisseurs sont déjà autorisés à effectuer cette recherche sur une base volontaire, mais la Commission veut la rendre obligatoire pour tous les services pour lesquels il existe un risque de partage ou de manipulation psychologique.

Le 10 octobre 2022, la proposition a été présentée et discutée pour la première fois au sein de la commission LIBE du Parlement européen ; le pirate Patrick Breyer a été désigné comme rapporteur fantôme pour le groupe des Verts/ALE (ie. son négociateur). La première réunion de la commission LIBE aura lieu le 30 novembre 2022. Par la suite, le Parlement européen et le Conseil de l’UE discuteront des amendements proposés par les commissions, et ces délibérations pourraient se terminer dès la fin de l’année 2022.

Le règlement concerne les services de messagerie ainsi que les services de cloud computing et d’hébergement de toutes sortes, même les fournisseurs de services de communications chiffrées de bout en bout. Le règlement rendrait obligatoire la surveillance des conversations après que le fournisseur en ait reçu l’ordre par les autorités compétentes. Elles recevraient un tel ordre si, à la suite d’une évaluation, il s’avère qu’il existe un risque que le service (qu’il s’agisse de la fonction de conversation d’un jeu vidéo ou d’un service de vidéoconférence, de cloud, de services de courrier électronique, etc.) Par conséquent, comme il existe un tel risque pour tous les services de communication et de stockage en ligne, tous les textes, images, vidéos et voix (par exemple, les réunions visio, les messages vocaux et les appels téléphoniques) devraient être scannés. Lorsque l’algorithme pensera avoir trouvé un cas pertinent, le contenu en question serait transmis automatiquement à la police par le fournisseur de service, sans intervention humaine.

Le projet soulève de nombreuses inquiétudes au niveau des droits fondamentaux. En définitive, le règlement conduira à l’abolition du secret des télécommunications protégé par l’article 7 de la Charte européenne des droits fondamentaux, et constitue une ingérence grave dans la protection des données accordée par l’article 8 de la Charte. Cet ordre de scanner les conversations et contenus ne nécessiterait l’approbation d’aucun juge.

En outre, la technologie basée sur l’IA qui est utilisée entraînera vraisemblablement des quantités massives de faux signalements en raison du taux d’erreur inconnu des algorithmes (jusqu’à présent proposés). La Commission n’a pas fixé de normes contraignantes concernant le taux d’erreur maximal admissible. Les filtres de reconnaissance d’images sont connus pour leur capacité à détecter même des photos de vacances légales avec des enfants sur la plage ou des flirts consensuels entre mineurs, ce qui a pour conséquence de criminaliser des citoyens innocents et d’inonder la police d’innombrables faux positifs.

En outre, les algorithmes auxquels la Commission fait référence lorsqu’elle propose une telle mesure de filtrage ne sont pas accessibles au public et à la communauté scientifique, et le projet ne contient aucune obligation de divulgation. Les déclarations de diverses autorités renforcent ce soupçon d’une technologie sujette aux erreurs. Selon la police fédérale suisse, 80 % des rapports qu’elle reçoit sur la base des recherches déjà effectuées (généralement basées sur la méthode du hachage) sont pénalement non pertinents. De même, en Irlande, seuls 20 % des rapports du NCMEC reçus en 2020 ont été confirmés comme étant réellement de la pédopornographie.

Les agences de renseignement et les pirates informatiques pourront ainsi accéder plus facilement aux conversations et aux courriels privés. Dès que le chiffrement sécurisé sera affaibli pour permettre la surveillance des conversations, cette faille permettra à d’autres tiers d’accéder aux communications des personnes. Ainsi, les communications privées, de même que les secrets d’affaires et les informations gouvernementales sensibles, seraient exposées à des risques plus élevés de cyber-attaques et bénéficieraient d’une protection réduite.

Il est donc extrêmement peu probable que la surveillance des conversations ait l’effet escompté pour lutter réellement contre la pédopornographie. La surveillance obligatoire des conversations ne permettra pas de détecter la plupart des auteurs qui enregistrent et partagent de la pédopornographie, car on sait que les pédophiles s’organisent principalement par le biais de forums secrets autogérés sans algorithmes de contrôle, au lieu de partager leur contenu via des services commerciaux de courrier électronique, de messagerie ou de conversation.

En même temps, l’utilisation d’une technologie qui lit automatiquement les communications privées en ligne est dangereuse, car elle peut facilement être détournée à d’autres fins. Dans les États autoritaires, de tels filtres sont utilisés pour persécuter et emprisonner les opposants désagréables au gouvernement.

En outre, pour lutter efficacement contre les abus, il faut renforcer les moyens des forces de l’ordre de manière spécifique au lieu de les encombrer de milliers de faux rapports. En outre, il faut créer des structures qui préviennent activement les abus dans la société et dans les institutions, afin de s’attaquer à la cause du problème et pas seulement à son symptôme. Enfin, le contenu existant doit être systématiquement supprimé d’Internet, contrairement aux pratiques actuelles de la police.

1 : Site de Patrick Breyer – Article Messaging and Chat Control Retour au texte

Élu et Pirate, tout un programme… – Épisode 2

Dans ce feuilleton proposé par l’équipage de coordination des élus du Parti Pirate, les Pirates vous feront voyager à la rencontre de leurs élus pour découvrir leurs mandats et mieux comprendre leur engagement à travers une série d’entretiens.

Découvrons ce que les députés européens du Parti Pirate ont fait en 2021 à travers le témoignage de Mikuláš Peksa, député européen Pirate et président du Parti Pirate européen.

Mikuláš PEKSA est biophysicien. Originaire de République tchèque, il est activiste politique et membre élu du Parlement européen. Ses charges d’élus se concentrent principalement sur les commissions de l’industrie, de la recherche et de l’énergie, du contrôle budgétaire, des affaires économiques et monétaires et des questions fiscales, ainsi que du développement régional. Il a commencé sa carrière politique au sein du Parti Pirate tchèque pour lequel il a d’abord été élu à la Chambre des députés du Parlement tchèque. M. Peksa préside également le Parti Pirate européen et le groupe d’intérêt sur le Tibet au Parlement européen.

Bruxelles à l’heure de la pandémie

Le monde entier est encore de train de lutter contre cette pandémie sans fin. Et cette année, nous, Européens, avons le droit à un nouveau privilège – un passe sanitaire européen toujours dans notre poche, qui nous ouvre les portes de toute l’Union européenne. Il nous permet de voyager avec un QR code unique, de la Finlande aux Îles Canaries. À propos, les Pirates ont milité pour une mise en œuvre du passe sanitiaire décentralisée, que la Commission européenne a fini par accepter, permettant d’éviter la création d’une base de données pan-européenne qui aurait stocké l’ensemble de nos données de santé, considérées comme sensibles, les exposant à un risque d’utilisation abusive.

« Au sein du Parlement, j’ai appelé de mes vœux une levée des brevets de production des vaccins. Ces brevets ne font en effet que limiter la production de vaccins, autorisant uniquement les entreprises qui en sont détentrices, et leur partenaires triés sur le volet, à en profiter. Par conséquent, les campagnes de vaccinations ont été plus lentes et plus couteuses ; nous avons subi le développement évitable de mutations et de variants. En fin de compte, même les États avec une couverture vaccinale élevée ont fait face à des risques élevés à long terme. Je pense que, dans la mesure où la recherche pour les vaccins a été financée par les contribuables européens, il est normal de rendre les notices de fabrication accessibles à tous. C’est dans ce sens que j’ai donc lancé un appel à la Commission européenne et au Conseil, pour qu’ils soutiennent cette initiative. »

Des élus européens toujours très engagés pour la protection des données personnelle

Grâce à la législation sur les services numériques (European Digital Services Act, DSA), les données personnelles des Européens seront mieux protégées. Mikuláš a été rapporteur pour ce dossier au sein de la Commission des Affaires Économiques et Monétaires (ECON) et rapporteur fictif au sein de la Commission de l’Industrie, de la Recherche et de l’Énergie (ITRE). L’élu européen est sincèrement convaincu que cet ensemble de mesure sera révolutionnaire.

La législation sur les services numériques va définir de nouvelles règles pour les grandes plateformes en ligne. Les plus gros acteurs tel Facebook et Google ont abusé de leur position dominante sur le marché et accumulé des quantités massives de nos données personnelles sans notre consentement. La législation permet à l’UE d’initier la voie devant les États-Unis qui tablent sur des mesures similaires dans les années à venir, elle devient la première région économique à mettre à jour la législation pré-Facebook devenue obsolète. L’idée centrale de la législation sur les services numériques est de moderniser l’approche par l’UE de ces plateformes et de les rendre plus transparentes, accessibles et libres. Un des objectifs principaux des Pirates que Mikuláš a réussi à intégrer dans les rapports finaux des commissions ECON et ITRE est ce que nous appelons l’interopérabilité. Elle permettra aux Européens de communiquer entre les plateformes, ouvrant le marché des services numériques aux plus petits acteurs. Nos élus européens se sont également battus pour la protection de la vie privée des usagers en définissant clairement le droit au retrait des contenus illégaux.

Au sein de la commission ECON, Mikuláš était également le rapporteur principal pour la régulation DORA qui établit de nouvelles règles pour les données financières et la sécurité de notre argent. Le nombre de cyberattaques croît chaque année. Les plus importantes peuvent potentiellement paralyser une institution bancaire complète, mettant en danger les intérêts de leurs clients, des citoyens Européens. La régulation DORA vise à assurer que la réaction aux cyberattaques soit rapide, efficace, et avant tout, planifiée. La régulation unifie et améliore les exigences sur la sécurité des systèmes d’informations des services financiers, minimisant ainsi l’impact potentiel d’attaques et protégeant nos comptes. Les dommages causés par ce type d’attaques peuvent facilement atteindre plusieurs millions d’euros. DORA introduit donc l’obligation de plans de crise adéquats. Parmi les victoires clés des Pirates, on trouve un modèle centralisé pour le signalement d’incidents, la surveillance indépendante des audits de sécurité et le partage de données avec les autorités. Jusqu’à maintenant, ces obligations différaient d’un état membre à l’autre, exigeant des banques une conformité avec 27 réglementations différentes. La législation DORA a simplifié ce système avec un cadre européen unifié.

Au sein de la commission sur le contrôle budgétaire (CONT), Mikuláš Peska a supervisé l’allocation des fonds de l’UE. En cette période d’investissements massifs pour le contrôle du changement climatique et de la pandémie, il est essentiel de s’assurer de la transparence de la redistribution d’argent en fonds de l’UE. En tant que rapporteur fictif, il a travaillé sur les recommandations du parlement Européen sur la numérisation du contrôle du budget, traitant les problématiques de fraude et corruption. En 2019, celles-ci chiffraient un total de 3,37 milliards d’euros. Le nouveau système de contrôle numérique doit permettre cette perte de fonds. Les citoyens méritent de savoir où part leur argent, le nouveau système doit donc être aussi transparent que possible. Notre élu européen a également travaillé sur la création d’un registre partagé de propriété effective avec des informations publiques et vérifiables avec l’idée que l’Union Européenne peut mériter la confiance du public seulement si elle est entièrement ouverte et à l’écoute de ses citoyens.

La lutte contre la fraude au cœur de l’engagement du Pirate tchèque

Cette année, un des souhaits de l’élu européen tchèque s’est réalisé avec la création du European Public Prosecutor Office (EPPO) , le parquet européen chargé d’enquêter et de poursuivre les suspicions de fraude et de détournement de fonds européen. Chaque état membre qui participe à l’EPPO a désigné ses propres candidats procureurs pour le parquet européen (NDLR Frédéric Baab pour la France). Le parquet européen étant un organe paneuropéen indépendant, il peut également s’attaquer à la fraude transfrontalière qui a prouvé ses difficultés à être traité par les parquets nationaux. Le parquet européen a traité environ 300 affaires dans les trois premiers mois de son existence, qui représente 4.5 milliards d’euros du budget de l’Union européenne. Cet argent peut très certainement avoir une meilleure destination que les poches d’oligarques et d’escros habitués à profiter des fonds européens et de la confiance de ses citoyens. C’est d’ailleurs le cas de l’ancien premier ministre tchèque, Andrej Babiš, qui va devoir rendre des comptes devant le Parquet européen.

Mikuláš a également été le principal rapporteur pour la création d’un cadre européen éthique, partagé, unifié et indépendant, qui était l’une des priorités de la Commission d’Ursula von der Leyen. 50 % des anciens commissaires européens et 30 % des anciens députés européens travaillent aujourd’hui dans des organisations qualifiées de lobbies par l’UE. Cela leur permet de profiter de leur position exceptionnelle dans les structures de l’UE et leurs liens avec la politique européenne. C’est à cela que le cadre éthique veut s’attaquer, en améliorant la transparence des réunions de lobbying, des marchés publics, de l’acceptation de cadeaux ou de l’utilisation de comptes bancaires pour les fonds publics.

Préserver l’environnement

« Cette année, j’ai été l’un des rares membres tchèques du parlement européen à m’impliquer activement dans la protection des paysages et de l’environnement de la République tchèque. Mon cabinet d’eurodéputé s’est concentré sur les suites de la catastrophe de Bečva et de l’exploitation minière de Turów, **que je considère comme des échecs de l’état de droit. Dans ces situations, Bruxelles est une source d’espoir pour les citoyens touchés lorsque les gouvernements nationaux échouent. À l’heure actuelle, le parlement européen discute d’une pétition que des citoyens tchèques touchés par l’exploitation minière de Turów ont déposée. Nous avons également réussi à faire en sorte que la Commission européenne se joigne à l’action engagée devant la cour de justice européenne, ce qui a entrainé l’arrêt immédiat de l’exploitation minière. »

La Pologne doit maintenant faire face à une amende de 35 millions d’euros, qui augmente d’un demi-million par jour, en raison de son non-respect de l’arrêt. Toutefois, il convient de noter que les amendes ne peuvent rien résoudre à elles seules si elles ne touchent pas ceux qui sont à l’origine du problème. Ici, il s’agit de la compagnie minière PGE et du parti au pouvoir, le PiS. Nos élus européens du Parti Pirate poursuivent donc leur combat pour le paysage et l’environnement tchèques. Au cours de l’année à venir, Mikuláš continuera à faire en sorte que la Commission et la Cour de justice fassent respecter l’interdiction de l’exploitation minière à Turów.

En tant que membre du groupe des Verts/ALE au parlement européen, notre élu tchèque a également soutenu l’engagement de l’UE en faveur de la neutralité climatique d’ici 2050, comprenant l’échéance de réduction des émissions de 55% d’ici 2030 (par rapport aux niveaux de 1990). Il s’efforce de faire en sorte que la décarbonation soit le plus transparente possible et conforme au consensus scientifique plutôt qu’à l’ambition politique des miniers et de leurs alliés dans divers gouvernements. Mikuláš pense que les changements nécessaires doivent rester juste socialement. Le « Just Transition Fund » (fond de transition juste) en est un bon exemple, et nos élus européens ont veillé à ce qu’il finance des innovations et des services qui ont un réel impact pour les foyers.

Il est primordial que les TPE/PME puissent profiter de ce fond puisqu’elles sont celles qu’il devrait aider en priorité. L’élu Pirate essaie actuellement de promouvoir cette approche en République tchèque, même si leurs dirigeants ont essayé de faire le contraire, en ne donnant quasiment rien aux habitants des régions minières, et en soutenant les géants miniers ou les sociétés ayant un passif louche.

« J’ai essayé d’informer la population tchèque sur la politique environnementale de l’Union Européenne de manière systématique et approfondie, car les problématiques liées à la décarbonation sont relativement nouvelles dans les médias tchèques. L’abondance de l’information résulte dans de nombreuses incompréhension et simplification. C’est pourquoi cette année, j’ai lancé un nouveau Podcast intitulé « Growth with a Clear Conscience », grandir avec la conscience tranquille. Son objectif est de vulgariser, de rendre un peu plus accessibles les débats scientifiques concernant l’environnement et le développement durable. J’aimerais qu’il permette de combler le trou présent dans les médias tchèques. Cela a été clairement démontré dans le discours de l’ancien Premier ministre tchèque lors de la COP 26 à Glasgow. À cette époque, tout le monde parlait de la manière de prévenir les effets du changement climatique sur les personnes, les États, les nations, le sol sous nos pieds, la nature, tandis que M. Babiš critiquait la Commission européenne pour les quotas d’émission que les entreprises chimiques de sa holding personnelle devaient payer. »

Et pour la suite ?

Mikuláš est satisfait de constater que son travail a des résultats tangibles. Que ce soit dans la promotion de l’interoperabilité, dans la proposition de loi sur les services numériques DSA (Digital Services Act), qui aura des répercutions majeures dans le monde numérique à long termes, ou encore sur le passe COVID, qui facilite la vie des européen au quotidien.